Des étudiants de l'EPFL imaginent la Fête des Vignerons de 2039

«L’idée était de demander aux futurs acteurs de la construction et de l’environnement formés à l’EPFL leur vision d’un tel événement», explique Florence Graezer Bideau, maître d’enseignement et de recherche au Collège des Humanités de l’EPFL, spécialisée dans le patrimoine. «En 2039, lors de la prochaine la Fête des Vignerons, ces étudiants seront peut-être même amenés à travailler sur le sujet dans le cadre de leur vie professionnelle», relève-t-elle.

Approche interdisciplinaire
Chaque édition de la Fête des Vignerons, inscrite sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO en 2016, est une photographie instantanée d’une époque. Celle de 2019, centrée autour d’une arène en forme de stade et d’un spectacle s’alliant à la technologie, n’échappe pas à la règle. Des enseignants de l’EPFL ont ainsi eu l’idée de demander à leurs étudiants de deuxième année de bachelor de conceptualiser un projet de Fête des Vignerons pour l’édition de 2039, dans le cadre d’une semaine de travail interdisciplinaire à Vevey, sur le terrain.

A cette fin, des étudiants en architecture, génie civil et ingénerie de l’environnement ont élaboré ensemble sept projets ancrés dans le paysage culturel du Lavaux, site du patrimoine mondial depuis 2007. En face d’eux, cinq professeurs, eux-mêmes issus de domaines de recherche différents et de deux Facultés de l’EPFL, ont récolté et évalué leurs idées.

Décentralisé, durable et convivial
Résultats? Les projets présentent une Fête des Vignerons différente, plus ouverte sur la ville de Vevey et la région du lac Léman, un événement décentralisé, durable et convivial. «Nous avons affaire à une génération moins sensible que la précédente à la hiérarchie», souligne Jeffrey Huang, professeur spécialisé en informatique appliqué à l’architecture. «Ce rapport se traduit par des projets très décentralisés sur le territoire».

Le projet «Pergolavaux», par exemple, propose un long chemin didactique en pergola consacré aux travaux de la vigne qui conduit les visiteurs de Pully au cœur du Lavaux. Avec «L’île des vignerons», d’autres étudiants ont imaginé construire une place de fête avec des vignes en terrasses sur le lac, en miroir du vignoble du Lavaux. L’île abriterait l’actuel Musée de la Confrérie des Vignerons de Vevey.

Refus de l'éphémère
«Nous avons constaté également un refus du caractère éphémère de la Fête», note Luca Ortelli, professeur en architecture. Avec les projets Autosuffisance énergétique et Trace(s) , les étudiants ont proposé par exemple de réaffecter les éléments de l’arène de 2019 et les dispositifs de production énergétique locale, ou d’utiliser le tracé de fondations d’une arène conique pour créer un nouvel espace public en lieu et place de l’actuel parking.

Professeur en sciences et ingénierie de l’environnement, Alexandre Buttler relève lui aussi l’envie des étudiants de changer de paradigme: «Ils ont eu le sentiment que le modèle traditionnel de la Fête des Vignerons, qui implique le déploiement de beaucoup d’énergie sur une courte durée et dans un espace exigu, arrivait à un point de saturation.»

Cycles courts
Luca Pattaroni, maître d’enseignement et de recherche spécialisé en sociologie urbaine abonde en ce sens: «Les étudiants ont naturellement proposé de développer des nouveaux espaces dans la ville et les alentours qui pourraient être réutilisés lors d’autres événements culturels. Ils ont aussi souhaité intégrer davantage les commerçants locaux à la Fête afin de garantir des cycles courts, notamment pour les stands de nourriture.»

De manière générale, les étudiants ont souhaité «rendre la fête à la population», résument les cinq enseignants. Avec, au bout du compte, à la place d’un grand spectacle, plusieurs spectacles diffusés dans la ville et la région. Tenons-nous ici l’essence de la prochaine Fête des Vignerons? Réponse en 2039.