D'une crise à l'autre, les banques sont lentes à s'adapter

©RangerRick

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Le secteur financier sait-il s’autoréguler? Une étude menée par le Swiss Finance Institute de l’EPFL, auprès de 350 institutions américaines, montre que celles qui résistent mal à une crise en feront de même à la suivante. Le choix du business model de départ est donc primordial.

Les banques procèdent-elles à des changements leur permettant de mieux faire face aux turbulences des marchés? Pas vraiment, selon une étude du Swiss Finance Institute del’EPFL, récemment publiée dans la revue «Social Science Research Network».

Les chercheurs ont analysé les performances et données de 350 banques américaines entre les deux crises financières récentes les plus importantes : celle de la dette russe en 1998 et celles des subprimes en 2007/2008. L’échantillon de cette étude porte aussi bien sur de grandes que de petites institutions. Il comprend des banques d’investissement, d’épargne ou commerciales.

«Celles qui avaient mal résisté à la première crise ont également mal résisté à la deuxième», résume Rüdiger Fahlenbrach, professeur assistant tenure track au Collège du management de la technologie, qui s’est penché, avec son équipe, sur les raisons de ces résultats.

Ils ont notamment constaté que l’identité du PDG n’avait que peu d’influence sur les performances de ces compagnies. Elles ne dépendent pas non plus de la nature des deux crises, toutes deux qualifiées successivement de «crise la plus grave des cinquante dernières années», mais engendrées par des phénomènes différents. En 1998, la Russie n’avait pas pu honorer sa dette, créant ainsi une réaction en chaîne, les investisseurs enregistrant de fortes pertes et essayant de vendre leurs valeurs rapidement. En 2007, la crise est essentiellement née de la mauvaise estimation du risque des dettes immobilières et de la surestimation de la valeur de certains investissements ( titres adossés à des créances hypothécaires).

La prise de risque de refinancement ne paie pas

«Contrairement à une idée reçue, les petites institutions s’en sortent souvent beaucoup mieux et celles qui trinquent sont plutôt des grandes, relève Rüdiger Fahlenbrach. Ce qui est déterminant, c’est en fait le business model choisi au départ.»

Selon ce spécialiste, la manière dont les banques financent leurs dettes, qui sont très difficiles à vendre et à refinancer en temps de crises, est primordial. L’étude confirme que les institutions qui le font à court terme et ne disposent que de peu de fonds propres s’en sortiront moins bien en cas de crise. Sont aussi plus fragiles celles qui optent pour une croissance agressive et une grande prise de risques importantes. Et ces entreprises seront d’autant moins encouragées à changer leur modèle qu’il leur est souvent très profitable quand les marchés sont haussiers.

Avoir plus de fonds propres et moins de financements à court terme : tel est donc le message, basé sur des expériences concrètes et des données empiriques, que Rüdiger Fahlenbrach tente maintenant de faire passer en publiant son article et participant aux différentes conférences internationales.